« The next document in your box is… »

Présentation et manipulation des archives
dans The Search for Power de Tania El Khoury

The Search for Power : bande-annonce
Lecture performance installation de Tania El Khoury
en collaboration avec Ziad Abu-Rish
Création en septembre 2018 au ANTI Festival à Kuopio

 

À la manière d’un portfolio accompagné de légendes, cette contribution revient de manière subjective et impressionniste sur mon expérience de spectatrice de The Search for Power[1] de l’artiste libanaise Tania El Khoury, et plus particulièrement sur les différentes manières dont les documents y sont présentés. J’ai assisté à cette performance en 2019 lors du Fierce Festival de Birmingham, festival annuel international de performance et live art où Tania El Khoury a également créé Gardens Speak en 2014. Gardens Speak est une installation immersive qui proposait à un groupe réduit de spectateur·rices d’écouter des témoignages d’opposant·es syrien·es, reconstitués à partir d’une importante recherche documentaire dans leurs archives privées (journaux intimes, échanges épistolaires avec leurs familles, messages laissés sur les réseaux sociaux, etc.)[2]. The Search for Power prolonge ce geste artistique mémoriel et testimonial en partant cette fois d’un souvenir autobiographique qui conduit Tania El Khoury à explorer une part de l’histoire du Liban. Cofondatrice du collectif interdisciplinaire de recherche et de performance Dictaphone Group avec l’architecte Abir Saksouk, Tania El Khoury réalise des installations interactives et des performances in situ (ou site-specific) pour interroger les aspects occultés de l’Histoire et partager des connaissances difficilement accessibles, avec un objectif esthétique et politique de réparation et de réappropriation.

The Search for Power est une performance (« Lecture performance installation » peut-on lire sur le site de la compagnie) conçue pour une trentaine de participant·es, écrite et interprétée par Tania El Khoury et son mari, l’historien Ziad Abu-Rish. Ensemble, ils retracent l’enquête qu’ils ont menée sur l’origine des coupures de courant électrique, encore récurrentes aujourd’hui à Beyrouth. Cette enquête les a conduits à explorer les archives de cinq pays (le Liban, les États-Unis, la France, l’Angleterre et la Belgique). Partant de leurs souvenirs personnels, et notamment d’une coupure du courant lors de leur dîner de mariage, ils racontent cette quête en invitant les spectateur·rices à consulter et lire avec eux un certain nombre des documents collectés. Leur contre-récit intime et documenté remonte jusqu’en 1908 pour transmettre une histoire jusqu’ici occultée et unilatéralement consignée du point de vue des puissances économiques et politiques dominantes. 

Sans dévoiler l’intégralité de l’enquête ni la totalité de son dispositif, afin de préserver la découverte pour de futur·es spectateur·rices, je commenterai certains procédés scénographiques et performatifs de mise en visibilité et de manipulation des documents en m’appuyant sur des photographies du spectacle et sur quelques mises en regard avec d’autres performances ou formes théâtrales dont j’ai pu faire l’expérience.

The Search for Power
Fierce Festival, 2019
© Marion Boudier

Toucher, manipuler, effeuiller, palper. Peut-on reconvoquer la mémoire d’un spectacle à partir des seules sensations tactiles qu’il a produites ? Mes mains gardent le souvenir du contact des différents types de carton et du papier des documents que Tania El Khoury nous invitait à examiner dans The Search for Power, plus ou moins épais ou fragiles, supports imprimés d’un texte ou emballages protecteurs, sous la forme de pochettes, chemises avec ou sans rabat, enveloppes, étuis. Cartons, boîtes, enveloppes, etc., qu’il faudra ouvrir : dans ce spectacle, l’archive se donne d’emblée comme un élément dont il faut chercher, voire forcer l’accès.

Le souvenir de cette manipulation de documents va de pair avec celui d’une autre performance, également vue pendant le Fierce : In Many Hands de Kate McIntosh, qui fait circuler entre les mains de spectateur·rices attablé·es des matières et des matériaux concrets (papiers, pierres, bois, tissus, poudres, etc.). Pour ces deux formes, dites participatives ou interactives[3], j’étais assise à une table, non pour manger ou converser avec d’autres convives mais pour observer et manier un ensemble de matières ou documents. La performance de Kate McIntosh me reste en mémoire comme silencieuse et sensuelle. Le long de trois grandes tables où nous étions assis·es sans vis-à-vis, chacun·e observait, soupesait, reniflait, tâtait l’objet avant de le passer à sa voisine ou son voisin. L’échange avait débuté en pleine lumière puis se terminait dans l’obscurité, ce qui rendait plus attentif·ve encore au contact des objets, à l’effleurement des mains des personnes assises à côté, au son des matériaux échangés, cognés ou glissés contre le bois de la table. De manière très différente, The Search for Power de Tania El Khoury instaure une forme de socialité plus formelle et une attention intellectuelle, en pleine lumière. La table qui nous réunit est élégamment dressée, avec des serviettes blanches, des verres à pied et des carafes de vin, des grappes de raisin, des bougies. Mes mains ne se saliront pas à cette table. D’ailleurs, une paire de gants blancs est posée sur ma serviette.

The Search for Power
Fierce Festival, 2019
© Manuel Vason

Dans la scénographie conçue par Petra Abousleiman pour The Search for Power, la table a été préparée comme pour la célébration d’un événement. Tania El Khoury et Ziad Abu-Rish nous invitent à nous servir à boire et à nous mettre à l’aise. Notre groupe est semblable à celui que formaient les convives de leur mariage en 2016, nous disent-il. Quelques détails détonnent cependant : nos hôtes ne sont pas installés avec nous mais chacun·e respectivement à une extrémité de la table, à un petit bureau qui évoque plus la table de régie du côté de  Tania El Khoury et le bureau d’un conférencier du côté de Ziad Abu-Rish ; notre table est entourée d’étagères chargées de boîtes blanches à pans coupés (porte-revues) ; à la place de notre assiette est posée une volumineuse boîte grise anthracite, une boîte en carton dite ouvrante, c’est-à-dire avec un couvercle à battant, traditionnellement utilisée comme conditionnement secondaire pour l’archivage longue conservation de documents de format A4. Mon couvert est ainsi constitué d’une boîte en carton grise que l’on ouvre à l’aide d’un ruban de coton crème, d’une paire de gants en tissu blanc, d’une loupe, d’un coupe-papier et d’un crayon.

Tania El Khoury nous raconte qu’une coupure de courant a eu lieu pendant leur soirée de mariage et qu’elle et son époux se sont alors fait la promesse de mener une enquête sur ce problème récurrent de l’électricité au Liban et d’en faire une performance. La boîte grise en lieu et place de mon assiette est leur « boîte aux trésors » (« treasure box »), nous confie Ziad Abu-Rish : elle contient, selon eux, 20 % des archives relatives à l’électricité libanaise. Entourée de grappes de raisin et de bougies, cette simple boîte grise prend en effet l’allure d’un bien précieux. Elle est posée tel un coffre, compacte, hermétique, secrète, à conquérir. Elle entre en contraste avec la longueur horizontale du rectangle de la table et avec la verticalité des étagères qui délimitent l’espace rectangulaire du banquet. L’épure chromatique, l’alliance des gris de la boîte et de la table avec le blanc des étagères et des serviettes, ponctuée des tâches vertes et rouges des raisins, contribuent à créer une esthétique sobre qui mêle des références à la salle de lecture aux Archives et à la salle de banquet. Dans cette scénographie, qui relève de l’installation d’art plastique et de la reconstitution en superposant deux espaces d’habitude éloignés, cette boîte m’apparaît comme une matérialisation possible de l’intrication entre histoire intime (récit du mariage des deux performeur·ses et de souvenirs de coupures de courant ayant jalonné leur vie depuis l’enfance) et grande Histoire (l’Histoire politique et économique de l’électricité au Liban qui sera retracée grâce aux archives).

The Search for Power
Fierce Festival, 2019
© Marion Boudier (à gauche) et Manuel Vason (à droite)

Comment suis-je arrivée à cette table, face à cette boîte grise ? Un bulletin au nom de chaque participant·e est posé sur chaque boîte. Je trouve ma place de cette manière. Ce bulletin est le premier fac-similé de document utilisé dans la performance : c’est un bulletin de la « société anonyme ottomane des tramways et de l’électricité de Beyrouth », où j’ai dû écrire mon nom et qui a été tamponné par une guichetière (Petra Abousleiman) juste après que j’ai passé le contrôle à l’entrée du lieu qui accueille la performance (A. E. Harris, une ancienne usine de fabrication de métaux reconvertie en théâtre). Le papier est jauni, la calligraphie à l’encre rouge est datée. Je ne saurais dire si ce bulletin est celui d’une souscription à une société privée ou celui de l’achat d’un titre de transport ; les deux indications de lieu qui y figurent se télescopent dans ma tête (une société ottomane basée à Bruxelles) ; la date incomplète (« 190 . ») me fait reculer dans le temps de plus d’un siècle. Le ton autoritaire de la guichetière et ma crainte de mal comprendre l’anglais m’ont retenue de poser des questions… Placé sous le signe d’un échange commercial, ce bulletin met en abyme l’achat du billet de spectacle tout en annonçant en filigrane certaines thématiques de l’œuvre à venir. Après avoir complété le bulletin avec mon prénom et mon nom, d’une écriture maladroite et rapide pour ne pas faire attendre les personnes qui font la queue derrière moi, je rejoins un groupe qui attend à l’entrée d’un couloir à travers lequel la guichetière nous guide bientôt. Plongé dans la pénombre et encombré de câbles électriques emmêlés, ce couloir nous conduit dans un deuxième espace, où les bulletins ont été disposés de façon à nous désigner nos places à une longue table rectangulaire.

Cette table m’en rappelle immédiatement d’autres. Les tables de dramaturgie, autour desquelles on discute et on échange des lectures, devenues depuis plusieurs années déjà l’un des éléments scénographiques récurrents des écritures collectives de plateau, que cette table soit métamorphosée en table de repas comme dans Une raclette (2010) des Chiens de Navarre ou en bureau du Comité de salut public comme dans Notre Terreur (2009) des D’ores et déjà. Ces spectacles ont plus de dix ans. Time flies… En élargissant mes travaux du théâtre dramatique vers la performance et la recherche-création, j’ai découvert et expérimenté ces dernières années d’autres types de tables. La beauté du dispositif de Tania El Khoury me fait penser à la chaleur d’une autre table, elle aussi rectangulaire et longue, la « longue table » (The Long Table, 2003) de la performeuse Lois Weaver à laquelle je me suis assise beaucoup plus récemment lors d’une journée-laboratoire organisée en juin 2018 avec Chloé Déchery pour « Performer les savoirs ». Dans ce « dispositif d’adresse publique »[4], élaborée par Lois Weaver pour partager une conversation sans modérateur·rice mais en présence d’une hôtesse bienveillante assise en bout de table, il n’y a pas de document manipulé ou observé posé sur la table. Les personnes attablées sont entourées d’un deuxième cercle ou rang de spectateur·rices ; elles parlent et griffonnent sur la nappe sous le regard d’une assemblée. C’est la nappe en papier, qui permet d’échanger des mots par écrit et de prendre des notes, qui fera document. La nappe produit en direct une archive de la conversation en cours. Je pense aussi en écrivant ces lignes, à la grande table du projet Dissect[5] de Samuel Bianchini et Emanuele Quinz, qui mêle le format académique de la table ronde et le dispositif scientifique de la table de dissection pour inventer théâtralement de nouvelles formes de publicisation de la recherche : un groupe de chercheur·ses manipule, montre, décrit et commente des œuvres, des objets et des images posées au centre de la table, en prise directe avec eux, et devant un public. Dans Moving Earths, Frédérique Aït-Touati propose une variation autour du genre du table-top en montrant le philosophe Bruno Latour à sa table de travail[6].

Dans The Search For Power, assis·es côte à côte, nous ouvrons chacun·e une boîte contenant les mêmes documents, sous le seul regard des deux performeur·ses qui nous guident, sans autre public. Nous n’allons pas regarder et commenter ensemble un échantillon de documents mis en commun. Nous n’assistons pas à une conférence. Nous n’écrirons pas non plus sur la nappe, bien qu’un crayon à papier fasse partie du nécessaire mis à notre disposition.

The Search for Power
Fierce Festival, 2019
© Manuel Vason

« Veuillez ouvrir votre boîte. Suivez nos instructions pour savoir quel document vous devez regarder en premier » (« Please open your box. Follow our instructions on which document you should see first ») : Tania El Khoury nous guide dans l’exploration de la boîte en nous indiquant quel document consulter et à quel moment. En préambule, elle nous a invité·es à faire attention à la qualité des papiers, aux dates, et même à l’odeur des documents. Un court temps nous est laissé pour accueillir la surprise provoquée par l’ouverture de la boîte, mais aucun·e des participant·es ne s’aventure à y fouiller tant le dispositif scénographique semble imposer une forme de cérémonial ou de protocole qu’on sent ne pas devoir déranger. Tania El Khoury nous demande ensuite d’en sortir les deux premiers documents, ce qu’elle fait elle aussi à sa table. Elle pointe du doigt les titres qu’elle nous invite à lire. Ainsi, nous progresserons dans la découverte du contenu de la boîte selon le rythme et les prescriptions des deux performeur·ses. Sur le moment, je ne ressens aucune contrainte à suivre leurs consignes et à être guidée pas à pas mais il est vrai que ce caractère prescriptif limite l’interaction proposée et ses possibles effets de sérendipité. Ce cadrage ou « guidage » ne laisse pas non plus de place à nos questions ou commentaires.

Pendant l’heure et demie que dure la performance, ce sont au total quarante documents qui nous sont présentés : de nombreux articles de presse en arabe, en anglais et en français, des rapports échangés entre des entreprises et les Ministères de l’énergie et de l’économie libanais, des comptes-rendus de la Banque mondiale, un extrait de manuel scolaire libanais, des données de l’armée française concernant des grèves d’ouvriers de l’électricité, des actes d’achat européens, une lettre d’un homme d’affaire libanais, un télégramme… À partir de deux articles de presse qui célèbrent la création de l’entreprise nationale de l’électricité du Liban en 1964, l’enquête interroge la permanence du problème de l’électricité jusqu’à aujourd’hui et remonte le temps pour en trouver les causes. Le document le plus récents date de 2018, le plus ancien de 1908 (date de la construction de la première infrastructure électrique à Beyrouth). Nous consultons ces documents selon l’ordre chronologique de l’enquête qui a permis leur découverte, chronologie qui implique également une géographie. Parti de Beyrouth, le couple d’artistes-chercheurs a remonté le temps pour trouver l’origine des coupures de courant dans la guerre du Liban puis dans l’occupation coloniale, en suivant des pistes économiques et politiques. Cela les a conduits à voyager à Washington pour consulter des rapports dans les Archives de la Banque mondiale, puis au Royaume-Uni, en France et en Belgique.

L’électricité se révèle évidemment avoir été un enjeu majeur pour les puissances coloniales de l’époque, la France en premier lieu, et pour certains grands propriétaires libanais dès le début du XXe siècle. Ainsi les documents attestent que l’histoire des pannes d’électricité au Liban n’a pas seulement pour origine les dysfonctionnements du service public et la Guerre du Liban mais aussi un ensemble de décisions politiques, diplomatiques et économiques, que Tania El Khoury et Ziad Abu-Rish qualifient d’« orgie » (« corporate-political orgy ») et qui implique « des hommes d’affaires locaux, des ministres libanais de l’énergie devenus millionnaires, des seigneurs de la guerre, des sociétés transnationales et les gouvernements français, belge, américain et britannique » (« local businessmen, Lebanese energy ministers who became millionaires, warlords, transnational corporations, and the governments of France, Belgium, USA and UK »). Leur enquête pointe notamment une responsabilité commune entre hommes d’affaires libanais et puissances étrangères, les transformations du pouvoir colonial en impéralisme économique, la compétition entre la France et les États-Unis au Moyen-Orient pendant la Guerre froide, les conflits d’intérêt entre les entreprises européennes et le gouvernement libanais qui, à partir des années 1950, a œuvré pour une nationalisation de l’électricité, des suspicions de corruption et de collusion entre membres du gouvernement et grands propriétaires, les liens entre les coupures de courant et le prix de vente de l’électricité, la mobilisation et le sacrifice des citoyens (manifestations, boycotts, cessations de paiement des factures d’électricité, régions sinistrées, voire sacrifiées à des enjeux économiques)… « Et naturellement aucune femme dans l’histoire. » (« And naturally no woman in the story. »)

La manière dont sont sommes invité·es à prendre connaisance des documents varie : nous sommes parfois prié·es de lire uniquement un titre, un en-tête ou un paragraphe que Tania El Khoury nous désigne, dont elle explique le contexte et la signification, ou bien nous devons feuilleter une liasse de documents pour retrouver une citation précise qui a été lue ou paraphrasée par les performeur·ses, ou bien pour nous attarder plus librement sur l’un des fac-similés. Notre consultation des archives a surtout valeur de confirmation ou d’exemplification par rapport au récit et aux interprétations proposés. Présentée dans le cadre du Fierce à un public européen et anglophone, cette consultation vaut aussi comme confrontation avec nos propres histoires coloniales. Avec douceur et simplicité, Tania El Khoury insiste pour que l’on s’attarde un peu plus longuement sur certains documents. Pour que l’on prenne le temps de feuilleter les archives britanniques sur l’implication française au Liban, elle lance une musique douce. Face à ces textes majoritairement écrits en anglais et en français, c’est notre Histoire qu’elle nous invite à relire en cherchant à faire celle de son pays. Une Histoire libanaise à laquelle il est impossible d’avoir accès à moins de pouvoir voyager à l’étranger et lire plusieurs langues étrangères. Hormis dans le « toast à l’amour et à la vengeance » (« toast to love and vengeance ») qui conclut la performance, la dénonciation n’est cependant pas véhémente, car elle est formulée de manière factuelle à l’appui des documents – « Nous avons appris », « Les documents ont porté à notre attention », « Vous pouvez lire que », « Comme vous pouvez voir »… (« We learnt », « The documents shifted our attention to », « You can read that », « As you can see »…) – , avec parfois une pointe d’ironie : « Surprise surprise, comme les Américains, les Français espionnaient les travailleurs de l’électricité » (« Surprise surprise, like the Americans, the French were spying on electricity workers. »). Si la consultation des archives est extrêmement guidée, voire contrainte, le message, bien qu’univoque, n’est pas asséné ni imposé. À chacun·e d’engager sa conscience comme il ou elle le souhaitera… et tout finit de toute façon par une danse, comme le soir de leur mariage, dans le noir.

The Search for Power
Fierce Festival, 2019
© Manuel Vason

En contemplant la trentaine de boîtes alignées, je pense à la puissance plastique et évocatrice d’une simple boîte, qu’on suppose pleine de documents témoins d’une époque ou d’une vie. Je pense aux cartons bruns des time capsules créées par Andy Warhol, aux boîtes en fer blanc emplies de souvenirs personnels de Christian Boltanski exposées au Centre Pompidou. Fermée, le boîte stimule notre imaginaire. Ouverte, elle ne dissipe pas immédiatement le suspens, car il est impossible d’en saisir le contenu d’un seul mouvement, il va falloir défaire la pile de documents, et même si on les étalait tous sur la table, certains resteraient inaccessibles, cachés dans des enveloppes scellées ou écrits dans une langue qui nous est inconnue.

Les couvercles des boîtes une fois ouverts ne se rabattent pas complètement, ils restent inclinés face à nos visages penchés vers l’intérieur de la boîte : cette posture me fait ironiquement penser à celle qu’on adopte devant un écran d’ordinateur – pensée fugace qui souligne a contrario la matérialité du contenu, des pochettes, des papiers imprimés, reproduits, plastifiés, alors que de plus en plus d’archives sont dématérialisées et accessibles en ligne. Les fac-similés contenus dans la boîte ne sont pas en majorité des reproductions d’archives téléchargées sur internet. L’acte de fouille qui nous est proposée nous fait expérimenter une certaine lenteur et une non-immédiateté d’accès, qui rejouent en miniature le long cheminement de Tania El Khoury et son époux à travers les Archives de plusieurs pays.

Les instruments de consultation des documents mis à ma disposition contribuent à la construction d’une attention spécifique. Le déroulé de la performance me sollicite pour porter attention aux documents de manière intellectuelle, en suivant le récit et les explications, en lisant certains documents pour corroborer l’interprétation qui m’en est proposée, mais aussi de manière sensible, physique et matérielle. La concentration exigée pour suivre les étapes de l’enquête se traduit par une série de gestes concrets qui sollicitent mes sens : yeux qui se plissent ou s’aident de la loupe pour déchiffrer un texte, délicat mouvement du poignet avec le coupe-papier pour décacheter une enveloppe sans la déchirer, manipulation du bout des doigts pour sortir et ranger un document dans une pochette nécessaire à sa bonne conservation. Dans la boîte (conditionnement secondaire), la plupart des documents sont protégés par des conditionnements dits primaires, comme des chemises et des enveloppes. Certains documents ont été plastifiés, d’autres sont plus souples et glissants sous les doigts. Les couleurs sont pastel, pochette bleu pâle, télégramme vieux rose, rabat vert céladon ou bleu ardoise, du beige, du gris, camaïeu délavé qu’on ne rencontre que dans des salles d’archives, ici parfaitement reconstitué.

Le gant et la loupe m’apparaissent tels des accessoires à la fois archétypaux et mythologiques. D’une part, ils évoquent de manière réaliste les ustensiles propres à la manipulation d’archives, les gants blancs renvoyant également au commissaire d’exposition (les gants protègent l’œuvre et la montrent aussi en tant qu’œuvre précieuse et fragile). D’autre part, de manière presque kitch, ils convoquent l’imagerie romanesque d’un Sherlock Holmes (la loupe) ou d’un Arsène Lupin (les gants) et peuvent faire penser à certains jeux de société, comme Cluedo ou Les Mystères de Pékin, renforçant la part ludique de notre participation. Mais si le détective et le gentleman cambrioleur me viennent à l’esprit, c’est surtout qu’il s’agit effectivement d’une enquête, en bonne et due forme, respectablement menée selon un processus de collecte de preuves et de déduction, mais aussi d’une sorte de cambriolage, une effraction dans des archives difficilement accessibles et un récit empêché. Le gant et la loupe deviennent alors des instruments de justice et de revanche intime sur un système politico-économique défaillant. À la fin de la performance, Tania El Khoury et Ziad Abu-Rish nous invitent d’ailleurs à porter un « toast à l’amour et à la vengeance » en souvenir de leur dîner de mariage et de tous les instants intimes et privés assombris par les coupures de l’électricité publique.

The Search for Power
Fierce Festival, 2019
© Manuel Vason

Sur la table de Tania El Khoury, une console de régie son et lumière est posée à droite de la boîte d’archives. Sur le bureau de Ziad Abu-Rish, pas de console de mise en scène mais une autre forme de boîte jouxte la boîte grise, un contenant plus moderne pour des archives iconographiques : une trieuse de diapositives. Tandis que sa femme nous guide dans l’exploration de la boîte grise en nous indiquant quelle pièce à conviction en sortir et comment lire ces archives, Ziad Abu-Rish propose un autre type de documentation et une autre modalité de présentation des sources : il projette des diapositives sur un écran à trépied, posé au fond de la salle derrière son bureau.

La trieuse de diapositives est un objet qui semble un peu daté par rapport aux possibilités contemporaines de numérisation et de vidéo-projection des diapositives anciennes. Cette trieuse contribue à une scénographie low tech ou basse-technologie (comme celles qu’on peut trouver dans les spectacles de Grand Magasin, par exemple) qui joue avec l’image archétypale et un peu vieillotte de l’archiviste conférencier. Comme la boîte d’archivage grise à ruban blanc, l’écran sur pied et la trieuse nourrissent un imaginaire désuet qui, à l’ère de la reproductibilité, de la dématérialisation et de la diffusion massive des données, peut être interprété comme une mise en valeur de l’historicité, de la matérialité et de la fragilité des documents ainsi que de celles de leurs supports de conservation et de lecture.

Ziad Abu-Rish est présenté par Tania El Khoury comme un collectionneur obsessionnel de documentation historique (« obsessive collector of historical document »), mais les diapositives qu’il projette ne sont pas des reproductions ou des agrandissements des documents réunis dans la boîte grise. Ses commentaires concernent moins la documentation elle-même que les lieux de collecte. Il projette des images de leur voyage d’enquête, des photographies des lieux d’archivage et des bâtiments officiels. Il fait des remarques sur leur organisation et l’accès aux documents, racontant, par exemple, le chaos du classement à Beyrouth, la contamination à l’amiante du fonds libanais aux Archives de Nantes, l’excellente organisation et l’ambiance cordiale aux Archives de Bruxelles, le portail de contrôle électronique aux États-Unis, le calme et la cafétéria des Archives à Londres. Ironie de l’histoire, les Archives nationales du Liban ont récemment été installées au sixième étage de l’immeuble Piccadilly, dans le quartier d’Hamra à Beyrouth, c’est-à-dire dans le bâtiment d’un ancien théâtre abandonné (Piccadilly Theater, comme le montre la diapositive projetée sur la photographie).

Se présentant lui-même comme un piètre acteur – « Je suis un acteur terrible terrible terrible. Elle a littéralement écrit trois fois ‘‘terrible’’ dans le script » (« I am a terrible terrible terrible actor. She literally wrote “terrible” three times in the script ») –, Ziad Abu-Rish annonce d’emblée qu’il restera dans sa zone de confort et fera donc l’historien (« I’m going to retreat to my comfort zone and be a historian »). La complicité entre les deux époux est manifeste lorsqu’ils mettent humoristiquement en avant leur différence de statut professionnel : la distinction affichée entre le chercheur et l’artiste de performance est en réalité productive d’une grande complémentarité dans la collaboration et tend à s’estomper à mesure que le spectacle se développe[7]. Tania El Khoury apparaît comme une sérieuse exégète des sources et Ziad Abu-Rish se révèle être un excellent performeur. Il l’est d’autant plus dès qu’il peut délaisser les feuilles du script pour s’adresser directement à nous, comme le ferait un enseignant transmettant des éléments de contextualisation sur le rationnement quotidien de l’électricité à ses élèves. Il assume alors pleinement une posture de conférencier, révélant ce faisant la part performative propre à ce type de discours[8]. Sa posture, son adresse, sa manière de s’asseoir devant son bureau ou de se déplacer dans l’espace sont semblables à celles mises en œuvre dans une situation de communication pédagogique. Outre la promesse faite à sa femme le soir de leur mariage (dont il montre aussi des photographies), sa motivation est avant tout scientifique : constituer le premier ensemble archivistique critique de l’électricité au Liban : « nous construirons les premières archives de l’électricité au Liban, qui comprendront l’histoire de la résistance à ce putain d’état de fait » (« we will build the first archive of electricity in Lebanon that would include the history of resistance to this fucking state of affairs »), lui a assuré son épouse pour le convaincre de participer à la performance. L’ethos professoral de Ziad Abu-Rish instaure un cadre épistémologique dans lequel se noue un pacte de réception stable, loin de toute ambivalence entre factuel et fictif, vraies et fausses archives[9]. La participation d’un historien à la performance souligne non seulement une proximité de méthodes entre chercheur·ses et artistes mais aussi, dans ce cas, une visée commune, celle d’établir et de révéler certains mécanismes historiques et leurs conséquences dans le présent à partir d’une étude des archives. Le régime de la preuve n’est certes pas le même dans la performance que dans un article ou une communication académiques[10], la mise en récit et le temps limité impliquant notamment des ellipses ou des raccourcis dans la démonstration ainsi que l’absence de tout système strict de références (notes bibliographiques en bas de page, relevé des cotes des documents) ou d’évaluation par des pairs. Mais The Search For Power innove quant aux modes de publicisation de la recherche et rend manifeste que l’histoire se constitue et se transmet aussi ailleurs que dans les livres et les bibliothèques.

The Search for Power
Fierce Festival, 2019
© Manuel Vason

Sur cette photo, Tania disparaît littéralement derrière les documents. À sa façon, cette image est emblématique d’un positionnement dramaturgique qui fait du document non seulement une source d’information de l’œuvre, son contenu, mais aussi une donnée matérielle et plastique à partir de laquelle déployer un univers scénographique et un protocole interactif. Les documents informent, au deux sens du terme (renseigner et donner forme), la performance.

En tant que spectatrice, je n’ai pas souvenir d’autres expériences de ce type. D’une certaine manière, ces pochettes de documents parmi lesquelles la voix de Tania nous guidaient autour de la table font plus écho à mon travail de dramaturge. Je ne travaille pas à la table avec les comédien·nes de Joël Pommerat mais, lors des répétitions de Ça ira (1) Fin de Louis, il nous est tout même arrivé d’être assis ensemble, chacun·e pourvu·e d’un dossier cartonné dont je décrivais le contenu, en précisant quel document lire pour préparer le discours de tel député ou membre d’une assemblée populaire révolutionnaire[11]. Mon goût pour l’archive, comme objet de recherche et comme matériau dramaturgique et spectaculaire, est né avec ce spectacle, et je dois reconnaître que le plaisir pris lors de The Search for Power tient également à l’exposition d’une méthode, à la mise en partage des logiques de l’enquête et à la révélation de l’enjeu que représente la transmission d’une source historique, prélevée dans un ensemble documentaire bien plus vaste et complexe, auprès de participant·es moins informé·es. Récemment, j’ai expérimenté autrement ce potentiel narratif et scénique de la boîte d’archives en m’essayant à une communication performative lors d’un colloque sur l’archive comme lieu d’expérimentation[12] ; à partir des lettres et objets contenus dans une boîte en métal années 1950, j’ai reproduit pour les commenter certaines manipulations d’archives et usages de faux pratiqués par Chloé Déchery dans sa conférence-performée Créer sous d’autres noms que le sien.

Comme spectatrice, mes mains se souviennent des différents papiers, feuilles A4 pliées, livrets cartonnés, nommés bibles, feuilles de salle ou programmes du spectacle, qui sont rangés au fond d’un sac ou utilisés comme éventail pendant la représentation. Mais que ces documents soient des éléments de la diégèse, de l’action représentée et de la scénographie, qu’ils soient les objets et les matières mêmes du spectacle, voilà une expérience qui m’était inconnue avant d’assister à The Search for Power. Je pourrais évoquer l’installation réalisée pour Reconstitution : Le Procès de Bobigny (2019) d’Émilie Rousset et Maya Boquet, qui sollicite une forme de participation sans toutefois guider les spectateur·rices dans l’enquête comme le fait Tania El Khoury. Muni·es d’une cartographie de l’espace de la performance, nous pouvons choisir entre différents postes d’écoute. À chaque poste, au pied d’un cartel qui présente la personne dont les propos ont été enregistrés et qui vont être restitués par un·e acteur·rice à l’aide d’un oreillette, une pile de documents est à notre disposition, reproductions, selon les cas, de témoignages ou d’analyses du procès de 1972, d’extraits de conférences, de débats sur le droit à l’avortement, etc. Cette pile ne simule aucune authenticité de l’archive : c’est un tas de photocopies. Ces piles de documents sont réapparues, plus abstraites et poétiques, sous la forme de monticules de pages blanches dans la scénographie de Nadia Lauro pour Les Océanographes (2021) d’Émilie Rousset et Louise Hémon. Dans Reconstitution, leur valeur esthétique est peu marquée au profit d’une valeur d’usage. Les acteur·rices se saisissent parfois d’une feuille pour en lire un passage ou citer quelques lignes. Certain·es spectateur·rices lisent tout en écoutant l’acteur·rice ; une majorité ignore ces documents. Après le spectacle, ces documents sources de la performance sont devenus pour moi des archives de la performance, leur lecture a posteriori en prolonge la réception et, de même que j’étais invitée à construire mon propre cheminement de poste d’écoute en poste d’écoute, je peux librement poursuivre leur exégèse.

Hormis le bulletin de la société ottomane des tramways, il ne me reste aucune trace matérielle de The Search For Power, absence symptomatique d’une accessibilité plus difficile aux archives concernant l’électricité libanaise et d’une démonstration qui n’invitait pas au débat contradictoire mais cherchait avant tout à révéler et à dénoncer. Il s’agit essentiellement pour Tania El Khoury et Ziad Abu-Rish de transmettre une découverte et une lecture des sources et non de construire ou de déconstruire collectivement leurs usages. Leur objectif de révélation et de conscientisation se réalise à travers le récit d’une enquête, un cheminement géographique et une logique déductive, dont les indices sont soumis à notre observation active et incarnée (embodied) à travers une manipulation de documents. L’environnement scénographique créé pour cette mise en récit et en acte des documents est extrêmement riche, mêlant plusieurs univers de références publics (salle de consultation d’archives, salle de conférence) et privés (banquet de mariage) afin de (re)mettre les document au centre de la table, c’est-à-dire au centre de notre attention non seulement comme supports et vecteurs de connaissances, mais aussi comme entités concrètes et matérielles vouées à la disparition si on ne les conserve pas, ni ne les communique. La relégation des performeur·ses aux deux extrémités de l’espace, en dehors de la table, est révélatrice de ce décentrement ou recentrement autour du document, qui ne possède pas une simple valeur illustrative, mais devient l’enjeu central et la matière de l’œuvre, une clé de lecture sur le passé mais aussi pour le présent (après l’électricité, le pétrole implique aujourd’hui le même type de mécanismes politico-économiques). L’excavation des documents hors de la boîte, à l’aide de gants, de loupes et de coupe-papier, stimule une activité qui révèle aussi que nous ne sommes jamais de simples spectateur·rices, passif·ves, neutres ou à distance, mais toujours un maillon de l’histoire en tant que membre d’une communauté politique et héritier·ères d’une histoire qui ne finit pas de ne pas s’écrire.

 

Notes

[1] The Search for Power a été créé en septembre 2018 au ANTI Festival à Kuopio par Tania El Khoury en collaboration avec Ziad Abu-Rish. Voir le site de Tania El Khoury et de sa compagnieLe script et les documents de The Search for Power ont donné lieu à une très belle publication chez Tadween Publishing, Washington DC, 2020.

[2] Sur cette création, voir notamment Chloé Déchery, « ‘‘The Living Protect The Dead’’. Rejouer / exhumer / re-montrer l’Histoire : la pratique du performance re-enactement », dans Martin Mégevand (dir.), Dire les guerres. Performance & création, Paris, Éditions des Cendres, 2019.

[3] Tania El Khoury préfère le terme « interactif » à celui de « participatif » : « J’ai des réserves à l’égard du mot ‘‘participation’’ parce qu’il me rappelle la gouvernance participative, l’architecture participative, les politiques participatives, et ces étiquettes sont souvent utilisées pour tromper les communautés en leur faisant croire qu’elles ont des choix, alors que ces choix ont déjà été faits pour elles par des personnes au pouvoir. […] Je trouve qu’‘‘interactivité’’ convient mieux à l’éthique à laquelle j’aspire dans mon travail. » (« Tania El Khoury: Where No Walls Remain », entretien avec Anna Gallagher-Ross, Art Paper, hiver 2019-2020 : « I step away from the word “participation” because it reminds me of participatory politics, participatory architecture, participatory policies, and these labels are often used to mislead communities into thinking that they have choices, when these choices were already made for them by people in power. […] I find “interactivity” to be more suitable for the ethics that I strive for in my work. ») Sur ces notions, voir aussi : Anyssa Kapelusz, « De la ‘‘participation’’ au ‘‘participatif’’ : évolution de la place du spectateur », dans Catherine Cyr (dir.), Le Spectateur en action, Jeu, n° 147|2, 2013.

[4] Lois Weaver, « Laissez-moi juste poser ça sur la table », dans Marion Boudier et Chloé Déchery (dir.), Artistes-chercheur·es – Chercheur·es-artites, Dijon, Presses du réel, grande collection ArTeC, 2022. Voir aussi le site de la compagnie Split Britches.

[5] Sur une idée originale de Samuel Bianchini et Emanuele Quinz, Dissect a été créé en 2019 dans le cadre du groupe de recherche Reflective Interaction d’EnsadLab, laboratoire de l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs (EnsAD), Université PSL. Voir le site du projet.

[6] Voir Frédérique Aït-Touati et Duncan Evennou, « “Que cette pensée, j’arrive à la faire danser.” Retour sur la trilogie terrestre », entretien réalisé par Chloé Déchery, thaêtre [en ligne], Chantier #7 : Document-matérau (coord. Marion Boudier et Chloé Déchery), mis en ligne le 8 novembre 2022.

[7] On peut souligner qu’est également inversée la traditionnelle hiérarchie entre les sexes, qui place le savoir (et le pouvoir) du côté masculin : Tania El Khoury met en scène son mari et écrit également sa propre histoire. Sur les relations de couple en création, voir Marion Boudier, « Entre (eux) deux : dramaturgie et couple en création. », dans Giulia Filacanapa et Erica Magris (dir.), Couples en création, Montpellier, L’Entretemps, coll. Les points dans les poches, Montpellier, à paraître.

[8] Voir Bénédicte Boisson, Laurence Corbel, Anne Creissels et Camille Noûs, La Conférence comme performance : formes et actes du discours (XIXe-XXIe siècles), revue Déméter, n° 5, été 2020 – hiver 2021.

[9] Sur ces ambivalences entre réel et fiction, mémoire et imagination, dans la création contemporaine libanaise (chez Rabih Mroué et Walid Raad notamment), voir la thèse de Raymond Hosny, « La création théâtrale contemporaine au Liban entre mémoire archivée et document fictif », sous la direction de Jean-François Dussigne, Université Paris 8, 2016.

[10] Ce que Ziad Abu-Rish fait par ailleurs : voir notamment Ziad Abu-Rish, « Electricity in Early Independence Lebanon », Lebanese Center for Policy Studies (LCPS), 22 septembre 2015 ; Ziad Abu-Rish, Owain Lawson, Joanne Randa Nucho, Éric Verdeil et Dana Abi Ghanem, « Roundtable on the Past and Present of Electricity in Lebanon », Jadaliyya, 2 mai 2019.

[11] Marion Boudier, « La dramaturgie comme recherche : écrire avec la scène (de l’histoire). Retour sur le processus de création de Ça ira (1) Fin de Louis », thaêtre [en ligne], Chantier #2 : La Révolution selon Pommerat (coord. Frédérique Aït-Touati, Bérénice Hamidi-Kim, Tiphaine Karsenti et Armelle Talbot), mis en ligne le 9 juin 2017.‎

[12] Marion Boudier, « Archive, faux et usage de faux dans la conférence-performance Créer sous d’autres noms que le sien de Chloé Déchery – une tentative de restitution », colloque L’Archive comme lieu d’expérimentation. Construction, création, performance, organisé par Benoît Auclerc, Gilles Bonnet, Agnès Curel, Catherine Dessinges, Ross Louis et Gaëlle Théval, Université Lyon 3, Laboratoire MARGE, 17-18 mars 2022.

 

L’autrice

Marion Boudier est maîtresse de conférences en études théâtrales à l’Université Picardie Jules Verne, membre du Centre de Recherche en Arts et en Esthétique (CRAE) et de l’IUF. Également dramaturge, elle accompagne Joël Pommerat et la compagnie Louis Brouillard pour des projets au théâtre et à l’opéra, et a consacré plusieurs articles et ouvrages à ce travail : « La dramaturgie comme recherche : écrire avec la scène (de l’histoire). Retour sur le processus de création de Ça ira (1) Fin de Louis » (thaêtre, 2017), Avec Joël Pommerat, un monde complexe (t. 1, Actes Sud-Papiers, 2015), et Avec Joël Pommerat. L’écriture de Ça ira (1) Fin de Louis (t. 2, Actes Sud-Papiers, 2019, Prix du Syndicat de la critique). Depuis 2018, Marion Boudier et Chloé Déchery sont coporteuses du programme de recherche « Performer les savoirs » qui a notamment donné lieu à la parution du collectif Artistes-chercheur·es, chercheur·es-artistes. Performer les savoirs (Presses du réel, 2022).

 

Pour citer ce document

Marion Boudier, « ‘‘The next document in your box is…’’ Présentation et manipulation des archives dans The Search for Power de Tania El Khoury », thaêtre [en ligne], Chantier #7 : Document-matériau (coord. Marion Boudier et Chloé Déchery), mis en ligne le 8 novembre 2022.

URL : https://www.thaetre.com/2022/11/08/the-search-for-power-de-tania-el-khoury/

 

 

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