Performer la radio

Du Hörspiel sur scène à la radio performance

Bertolt Brecht, Der Lindberghflug / Der Ozeanflug
Deutsche Kammermusik, Baden-Baden, 1929
© Akademie der Künste, Berlin, Bertolt-Brecht Archiv

 

 

 

L’idée de représenter une pièce radiophonique sur une scène remonte aux origines mêmes de la radio. En Allemagne, on citera pour l’importance de son auteur et l’originalité de sa démarche, la représentation de la pièce radiophonique de Bertolt Brecht : Der Lindberghflug (Le Vol de Lindbergh), dont la musique a été composée par Kurt Weill et Paul Hindemith. Le livret faisait référence à la première traversée réussie de l’Atlantique par Charles Lindbergh en 1927, un exploit qui symbolisait pour Brecht le pouvoir de l’individu sur la société. L’œuvre fut créée au festival de musique de chambre de Baden-Baden en 1929. Pour la représentation, qui était retransmise en direct sur les radios allemandes, Brecht avait imaginé une mise en espace divisant la scène en deux moitiés, séparées par un écran : à jardin se trouvaient l’ensemble instrumental, le chœur et les haut-parleurs. Devant eux, un panneau portait la mention « La radio ». À cour était assis l’acteur Josef Witt, jouant le rôle de « L’auditeur », ce qui était également indiqué sur un panneau. Josef Witt déclamait la partie chantée de Lindbergh. Dans la version radiophonique telle que Brecht l’avait pensée, chaque auditeur devait jouer le rôle de Lindbergh depuis chez lui, assis devant son poste de radio.

En Allemagne, ces années d’expérimentation radiophoniques qui suivent la création du média se déroulent sous la République de Weimar (1918-1933), et sont arrêtées net par le nazisme[1]. Ce n’est qu’à partir des années 1970 que l’idée de mettre en scène des pièces radiophoniques fut reprise par Klaus Schöning, directeur du département Hörspiele de la Westdeutscher Rundfunk (WDR3). Pour donner de l’essor à l’art radiophonique, Schöning invita des compositeurs, des poètes, des écrivains, des artistes visuels, des cinéastes, à expérimenter ce média. Une de ses propositions fut précisément de présenter les Hörspiele en public et de les diffuser simultanément à la radio, donnant ainsi lieu à des formes scéniques hybrides, avec la présence d’acteurs ou de musiciens sur scène et/ou l’ajout d’effets sonores grâce à la multiplication des haut-parleurs.

Lors du premier festival international Acustica, en 1985, sous la devise « Les compositeurs comme créateurs de Hörspiel », Schöning réussit à étendre et à multiplier ce mode de représentation visuelle des Hörspiele en les présentant dans des salles de concert, des cinémas, des musées, comme des œuvres multimédias en direct. Son objectif était de rassembler des expériences et de montrer comment le Hörspiel pouvait être à l’origine de spectacles scéniques. Il explique :

Le Hörspiel avait su depuis des décennies s’affirmer, en renonçant tout d’abord à la scène de théâtre et en se cantonnant dans la scène intérieure et l’écoute radiophonique solitaire […]. L’intérêt renforcé des artistes sonores, des interprètes et des compositeurs revivifie, repense, remet sur le métier une possibilité depuis longtemps négligée, la représentation publique de Hörspiele[2].

Et il conclut :

Le Hörspiel, initialement une pièce radiophonique indépendante, devient l’instigateur d’un événement artistique multimédia, un Hörspiel parfaitement conscient de lui-même et dialoguant – hors de tout provincialisme – avec le flux des processus de l’évolution artistique générale. La radio comme moteur culturel[3].

En 1982, en France, Luc Ferrari fonde « La Muse en circuit », un studio de composition électroacoustique et de création radiophonique. À cette époque, le compositeur produisait régulièrement des Hörspiele pour les radios allemandes et imaginait déjà des extensions scéniques possibles[4]. Il avait organisé en ce sens, entre 1986 et 1987, dans le cadre de « La Muse en circuit », une série de concerts-spectacles[5], qui tenaient autant du Hörspiel sur scène que du théâtre musical.

De nouvelles expériences artistiques, menées en Autriche, viennent bientôt enrichir le genre. Dans le département de la Kunstradio (Radio d’art) de la ORF (Österreichischer Rundfunk, la radiodiffusion autrichienne), c’est à partir de 1987 que commencent à être menés des projets faisant éclater le cadre radiophonique, et qui prennent plus d’ampleur avec l’arrivée des technologies numériques[6]. Une même œuvre peut ainsi être présentée dans des formats mixtes, combinant différents types de diffusion : la diffusion hertzienne, la distribution de contenus sur le web et les représentations publiques. Toutes ces initiatives font partie de ce que Heidi Grundmann, initiatrice de cette tendance, a nommé « expanded radio art »[7]. Ces nouvelles propositions de la Kunstradio, toujours en cours actuellement, sont fondées sur la devise « on air, on line, on site » : « sur les ondes, en ligne, in situ ». À cet égard, ce qui est défini comme geste artistique est donc l’exploration du média, de ses spécificités, tant dans la transmission du son que dans la création de dispositifs pouvant inclure les représentations scéniques.

En France, de pair avec les espaces de création radiophonique existant sur les ondes des radios publiques ou sur des plateformes, on observe actuellement un intérêt croissant pour ce type de manifestation artistique, et diverses formes de radio sur scène sont présentées dans des salles de spectacle, des institutions culturelles, aussi bien que dans le cadre de festivals dédiés à la radio et à l’art sonore[8]. En tant que genre expérimental, ces œuvres n’ont pas de dénominateur commun, les artistes créent des pièces de formats divers, et leur donnent des appellations différentes. Certaines d’entre elles font référence à la radio de façon plus ou moins explicite : radio performance, radio théâtralisée, radio sur scène, radio sur le plateau, radio live, alors que d’autres utilisent des expressions où le mot radio n’apparaît pas, telles que performance, opéra parlé, séance d’écoute…

Pour établir les premières bases d’un panorama des formes prises par la radio représentée, nous évoquerons d’abord les genres scéniques qu’elle a suscités ou croisés historiquement, du théâtre instrumental à la performance ; nous définirons ensuite quelques-unes des caractéristiques du genre radiophonique pour interroger leur devenir scénique, avant de présenter un échantillon de créations d’artistes contemporains, représentatifs de la diversité des formes d’hybridation entre le sonore et la scène ; nous conclurons par la présentation d’une de mes récentes radios-performances, créée en 2018. Ce panorama ne prétend nullement être exhaustif, mais présenter quelques jalons et acteurs décisifs du vaste champ artistique de la radio performée.

 

Aux sources de la radio sur scène :
du théâtre musical à la performance

 

Il est indéniable que des différences substantielles distinguent le Hörspiel de toutes les manifestations scéniques auxquelles il peut se prêter, la première étant qu’il s’agit d’une forme artistique purement sonore. Mais qu’est-ce qu’un Hörspiel en tant que genre radiophonique ? Pour mieux le définir, il faut tout d’abord saisir le sens littéral des deux mots qui composent le terme : « écouter » (hören) et « jeu » (Spiel), donc « jeu pour l’écoute ». Le Hörspiel est basé sur l’expressivité des sons et sur le mélange des genres, il combine certains aspects du documentaire et de la fiction, et emprunte à des formes d’art expérimental comme la musique électroacoustique, la poésie sonore ou le théâtre musical. En réalité, ce terme, qui est né en Allemagne, a servi dans ce pays pour caractériser des pièces de tous genres. C’est pourquoi, pour identifier les œuvres plus spécifiquement expérimentales, une nouvelle appellation a été introduite en Allemagne dans les années 1960, Neue Hörspiel (nouveau Hörspiel), utilisée pour définir ce qui, dans des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou la France, continue à être désigné comme Hörspiel. Depuis, d’autres termes ont été inventés pour définir une pièce radiophonique expérimentale : Ars Acustica (art acoustique) en Allemagne, radio art dans les pays anglophones, radioarte dans le monde hispanique.

Néanmoins, si la radio sur scène suppose un point de rencontre entre l’art radiophonique et l’espace théâtral, c’est bien l’hybridité des matériaux du Hörspiel et le caractère expérimental de sa forme qui permet le déploiement scénique. À partir de ce constat, des liens se tissent entre des formes radiophoniques et des manifestations scéniques, autant par leurs origines, leurs contenus, que par leurs appellations qui font référence au médium. Cependant, même si dans le paysage théâtral contemporain, il existe des expressions hybrides qui incluent des sons et des images sur support, les formes scéniques qui peuvent s’apparenter véritablement à la radio sur scène sont celles qui donnent la prééminence au sonore.

C’est le cas de ces œuvres musicales scéniques qu’on présente génériquement sous le nom de « théâtre musical »[9]. Dans cette perspective, j’aimerais évoquer très sommairement la démarche de deux compositeurs majeurs qui ont tous deux œuvré en Allemagne. Le premier est Mauricio Kagel (1931-2008), qui tient une place unique dans l’histoire des Hörspiele, et dans l’histoire du théâtre musical avec l’invention du « théâtre instrumental » ; le second est Heiner Goebbels (né en 1952), auteur lui aussi de Hörspiele et de pièces de théâtre musical[10].

Avec Mauricio Kagel, on se trouve devant un paradoxe. Bien qu’il considère que le Hörspiel doive se suffire à lui-même sans recourir à la représentation (« la condition préalable de ce genre radiophonique originel, explique-t-il, est une capacité de transmission telle que les acteurs – locuteurs, musiciens, participants aléatoires – n’ont pas besoin d’agir sous les yeux de l’auditeur pour rendre la situation claire »[11]), il fait néanmoins partie des compositeurs qui ont mis certains de leurs Hörspiele en scène[12]. Quant à Goebbels, il existe une grande parenté entre son théâtre musical et sa pratique de l’art radiophonique. En effet, s’il a d’abord travaillé à la radio et composé des pièces radiophoniques qu’il a par la suite mises en scène[13], on retrouve des traces, dans ses créations scéniques ultérieures, d’une esthétique radiophonique : « rapidité, évocation d’objets sonores hétéroclites, mixage et mixité, contrepoint entre narration et sonorisation »[14].

Dans les deux cas, les relations entre théâtre musical et écriture radiophonique sont sensibles : l’importance de la musique jouée sur la scène, l’attention portée au sonore, et une intention qui va toujours du sens au son. Mais là où Kagel met en scène des fictions radiophoniques dont il signe lui-même le texte (en plus de composer la musique) et où les personnages sont joués par des acteurs, on a affaire, dans les spectacles de Heiner Goebbels, à des collages de textes littéraires provenant de divers auteurs, et lus par des acteurs-récitants. Aussi le principe de montage-collage et la part laissée à l’improvisation musicale et textuelle sont-ils perceptibles dans les spectacles de Goebbels, alors que dans les pièces de théâtre musical de Mauricio Kagel, on assiste à l’exécution et à l’interprétation d’une partition écrite où tout est indiqué. Néanmoins, c’est la logique musicale et sonore qui prime, tant chez Kagel que chez Goebbels, et le théâtre est lui-même considéré comme un processus musical[15]. Ainsi, la pratique compositionnelle de ces artistes dans ces deux domaines permet de comprendre comment ces deux modes d’expression (scénique et radiophonique) peuvent être mis en relation.

Il y a cependant d’autres formes artistiques qui possèdent des similitudes avec la radio sur scène. C’est notamment le cas de la performance. Pour définir cette pratique, RoseLee Goldberg propose une définition minimale : la performance est « un art vivant mis en œuvre par des artistes »[16]. Cette définition qu’elle revendique permet de regrouper sous le même terme des manifestations souvent très dissemblables. Goldberg ajoute :

toute autre précision nierait immédiatement la possibilité de la performance même, dans la mesure où celle-ci fait librement appel pour son matériau à nombre de disciplines et de techniques – littérature, poésie, théâtre, musique, danse, architecture et peinture, de même que vidéo, cinéma, projection de diapositives, narration –, les déployant dans toutes les combinaisons imaginables[17].

De fait, si l’on observe les caractéristiques des performances[18] telles qu’elles existent dans l’histoire occidentale d’une part, et d’autre part les formes de radio sur scène au moment de leur émergence, on constate que ces dernières partagent des points communs avec la pratique performative : dans les deux cas, l’interprète est l’artiste lui-même, les acteurs sont des actants qui ne jouent pas des personnages au sens où les acteurs de théâtre les incarnent, et il n’y a pas d’intrigue dans le sens traditionnel du terme, parce que ces premières formes empruntent davantage au documentaire ou à l’expérimentation qu’à la narration. De même, la performance peut être plus ou moins structurée. Elle peut décrire, présenter, visualiser l’œuvre en train de se faire, elle peut être exécutée une seule fois ou réitérée, improvisée, semi-improvisée, ou avoir fait l’objet de plusieurs répétitions. Dans ce sens, la forme hybride de radio sur scène s’apparente à l’art de la performance dans ce qu’il a de fragile, d’éphémère. Enfin, si la performance suppose une interaction avec le public, la radio mise en scène est une invitation faite aux spectateurs à aiguiser leur perception des phénomènes sonores et radiophoniques, en leur donnant un cadre d’écoute différent de celui du média.

Parmi les artistes « performeurs » que l’on peut associer à la radio, on citera l’artiste sonore Anna Friz, qui utilise des postes émettant des fréquences AM ou FM dans le cadre de ses installations sonores et de ses performances[19], ainsi que Tetsuo Kogawa qui, d’une manière tout à fait radicale, crée des performances avec les sons de fréquences radio produits par des micros transmetteurs[20]. Il considère de surcroît que c’est seulement avec de tels matériaux que peut s’écrire un véritable art radiophonique[21].

 

La radio en scène est-elle encore radiophonique ?

 

L’idée d’une radio sur scène semble d’emblée paradoxale, car il s’agit de créer ou de recréer l’espace invisible de la radio par des dispositifs qui le rendent visible, et de faire vivre au présent des événements qui, dans la pièce radiophonique, ont déjà eu lieu. Sur la scène se joue en effet un drame (au sens étymologique d’action) au présent, alors que dans le Hörspiel, toute action est aussi bien antérieure (puisqu’enregistrée) qu’intérieure (puisque tout a lieu en imagination). En outre, citant Richard Kolb, Reinhard Döhl rappelle que la radio « ne montre pas l’homme en mouvement mais plutôt le mouvement dans l’homme »[22]. À son tour, Mauricio Kagel s’est attaché à examiner les différences entre Hörspiel et théâtre musical. Il observait que ce qui est propre au langage radiophonique est la mise en jeu d’une simultanéité de lieux, de temps et de situation : même si au théâtre l’on peut représenter une multiplicité de situations simultanées, « la perception sera plus difficile, moins claire et plus lente, alors qu’à la radio, elle est immédiate »[23]. De fait, la radio ne fait intervenir qu’un seul sens, l’ouïe, et la perception y est par conséquent instantanée. Un autre aspect découle de cette perception mono-sensorielle : parce que seule l’oreille est sollicitée, la complexité peut être majeure, et l’on comprend ainsi que « la radio permet[te] de contrôler le contrepoint d’une manière bien plus subtile que sur la scène »[24].

En revanche, Kagel signalait un phénomène qui se produit dans le Horspiel et qui caractérise également ses pièces de théâtre musical : dans l’un et l’autre cas, il n’y pas d’évolution dramatique, mais un « état dramatique »[25]. Kagel citait comme exemple sa pièce radiophonique Le Tribun dans ces termes :

Le tribun est un politicien qui répète un discours ; au cours de la pièce, il s’interroge tout le temps sur ce qu’il doit dire ou ne pas dire : « sur l’Église non, aujourd’hui, je ne dirai pas du mal de l’Église », déclare-t-il à un moment donné[26].

À la suite de Kagel, on peut continuer à s’interroger sur ce qui éloigne ou rapproche les expressions scéniques et radiophoniques. En quoi les représentations publiques dont l’appellation se réfère explicitement à la radio ont-elles encore à voir avec le média radiophonique ? S’agit-il de l’utilisation d’un certain type de matériaux considérés traditionnellement comme radiophoniques ? Ou bien est-ce le média lui-même, son histoire, ses contenus, ses formes, qui sont le point de départ et/ou le sujet de la pièce scénique ?

Et si l’auteur aborde le genre avec ses références propres, c’est pour l’auditeur que le changement est radical : il devient spectateur. À partir de quel moment perçoit-il cette représentation comme radiophonique ? Il est certain que notre imaginaire et notre mémoire associent certains types de sons enregistrés à ceux qui nous sont arrivés par les ondes hertziennes. Nous reconnaissons dans l’enregistrement une couleur, un style, une sonorité que nous associons aux souvenirs d’écoutes radiophoniques qui nous ont accompagnés tout au long de notre vie, comme à l’intérieur de la maison, au volant d’une voiture, et pour ceux et celles de ma génération, par le son du transistor collé à l’oreille. Mais la radio est un espace toujours en mouvement, et aujourd’hui, l’arrivée de nouvelles formes de distribution de contenus – nommées génériquement « podcast »[27] – qui importent des contenus radiophoniques sur des plateformes logées sur le net, change notre rapport au média. Dira-t-on alors que « l’écoute radiophonique » appartient désormais à un certain moment de l’histoire de l’écoute, et qu’elle est aujourd’hui périmée ou sur le point de l’être ? Quels types de sons peuplent notre imaginaire à présent ? Peut-on encore les qualifier de sons radiophoniques ?

Ce qui est certain, c’est que dans ce nouveau contexte technologique, outre la radio sur scène, d’autres modes d’expression sonore ont cherché à faire « sortir » la pièce radiophonique de son mode de diffusion et de son cadre d’écoute, par le biais des installations sonores dans des galeries, des musées, des salles d’exposition, des théâtres, et par des écoutes publiques dans des lieux insolites ou alternatifs, qu’ils soient intérieurs ou extérieurs (des usines, des centres culturels, des jardins, des forêts, des cimetières). Toutefois, dans ces nouvelles situations qui provoquent une écoute collective et en assemblée, on ne demande pas à l’auditeur de devenir spectateur, ce qui est le propre de la représentation scénique.

 

Perspectives contemporaines

 

Je vais maintenant présenter une série de créations de radio en scène menées par divers artistes. On remarquera tout d’abord que les auteurs et autrices rencontrés mènent parallèlement des expériences artistiques dans le domaine de la radio et du spectacle vivant et, selon les cas, soit leurs productions sont associées à un projet radiophonique antérieur (ou simultané), soit il s’agit de productions totalement indépendantes. Certains ont débuté à la radio et, pour des raisons diverses, ont choisi de se produire sur scène[28], et l’on note souvent dans leur cheminement un aller-retour entre la radio et la scène.

Lorsque le projet est associé à la radio, ou bien l’artiste travaille en vue de la transposition au plateau d’un documentaire ou d’un essai radiophonique, ou bien il cherche une forme d’expression sonore et scénique originale. Dans le premier cas, on peut se demander si la réalisation radiophonique dont l’œuvre scénique procède, ne possède pas intrinsèquement, par les éléments qui la composent, une dimension spectaculaire, ou plus simplement, si elle peut accepter une transposition scénique, et dans ce cas, quels sont les impératifs d’ordre scénique auxquels elle sera confrontée.

Lorsque le projet est indépendant, la liberté de l’artiste est totale, et l’appellation « radiophonique » peut se justifier par un cadre de production/diffusion (un festival de radio, par exemple), par le parcours de l’auteur ou de l’autrice qui l’associe à la radio, par une volonté de faire référence à la radio, ou encore par l’emploi de sons du réel enregistrés sur une scène, qui donnerait une connotation radiophonique au projet[29].

Quoi qu’il en soit, il y aura toujours un principe commun : la transformation d’un art-relais en un art vivant joué sur scène et face à un public, selon un alliage qui réunit et fait dialoguer dans un espace musical/scénique des sons enregistrés, diffusés sur un support, avec ce qui se produit à l’instant même de la représentation. Sur le plateau, se jouent à la fois un contrepoint entre le passé et le présent, et un contrepoint entre le documentaire et la fiction, car même en partant d’un univers documentaire et des sons du réel, dans bien des cas, la scène impose le besoin d’un texte fictionnel énoncé en direct.

Qu’ils gardent ou non un lien explicite avec la radiophonie, quelles sont les stratégies dramaturgiques utilisées par les auteurs et autrices dans les diverses expressions de radio sur scène, et dans leurs diverses appellations rappelées plus haut : radio performance, radio théâtralisée, radio sur scène, radio sur le plateau, radio live… ? En passant en revue ces différentes formes existantes, on peut dégager certains traits communs :
– une concomitance du temps instantané de la performance et de ce qui se joue en direct, avec le temps passé des éléments enregistrés ;
– une dramaturgie latente, une écriture scénique basée sur le principe du montage et/ou du collage ;
– la non-hiérarchisation des matériaux acoustiques : voix parlée ou chantée, bruits, ambiances, musiques ;
– une absence de personnages au bénéfice d’acteurs actants ou récitants (qui peuvent réaliser des actions scéniques) ;
– la présence de musiciens jouant des instruments réels ou virtuels ;
– le rôle central d’une voix parlée sonorisée ;
– une part d’improvisation dans les textes récités, les musiques jouées, les sons diffusés (en comparaison du caractère strictement minuté d’un direct radiophonique) ;
– un dispositif scénique minimal, la scénographie étant plus liée à la technique, et étant parfois réduite aux seules lumières ;
– un nombre réduit d’interprètes et de musiciens.

Mes échanges avec des artistes radiophoniques et sonores ayant créé des pièces scéniques m’ont permis d’observer les différences de leurs postures esthétiques, qui se traduisent par une grande diversité de propositions. Les variations sont multiples, selon que l’accent est mis sur le dispositif d’écoute, sur le récit, sur les éléments sonores et musicaux, ou sur plusieurs de ces aspects à la fois. Ainsi Judith Bordas[30] invente des dispositifs scéniques reprenant le sujet et les sons d’un documentaire radiophonique déjà diffusé, et porte l’accent sur la mise en place d’un espace de partage en temps réel, un espace d’écoute active et critique. Elle définit cette situation comme hybride, entre la mise en condition sous forme d’immersion sonore, et la performance proprement dite qui offre une dynamique de jeu entre des actants, à quoi elle ajoute un texte fictionnel qui ne faisait pas partie de l’œuvre radiophonique, pour créer une forme scénique qui soit en même temps documentaire et fictionnelle.

Marie Guérin[31] aborde un même sujet documentaire à la radio et à la scène, mais elle le conçoit sous deux formes séparées. Elle affirme que son besoin de faire de la scène provient en partie de sa pratique du direct à la radio, et reconnaît dans la forme scénique des analogies avec l’art de la performance : sa présence en tant qu’autrice qui diffuse les matériaux archivés ; les haut-parleurs pris comme des personnages ; les coulisses de la radio révélées dans une mise en scène minimale, privilégiant toujours l’écoute.

C’est aussi le souci de Benoit Bories[32], qui inscrit ses documentaires radiophoniques en scène dans deux types de configuration : soit il les diffuse dans un site choisi en raison de sa proximité ou de sa résonance avec le sujet abordé, et il en fait un concert documentaire au son spatialisé, composé de séquences narratives séparées par des moments de musique pure, soit il crée une situation plus proche de la performance, en étant présent sur scène pour manipuler des objets qu’il transforme à l’aide de différents outils technologiques.

Avec une préoccupation similaire, Antoine Richard[33] cherche un espace de diffusion pour son œuvre sonore, qui possède une résonance particulière vis-à-vis de l’objet traité. L’objectif est une mise en condition de l’auditeur-spectateur, pour lui offrir une situation d’écoute optimale en assemblée, elle aussi active et critique. Il apparente le dispositif qu’il met en place à une séance d’écoute publique ou à une installation sonore plutôt qu’à une proposition de radio sur scène.

Pour sa part, Amandine Casadamont[34], tout en reconnaissant que son expérience radiophonique influence son écriture, développe plusieurs types de projets scéniques qui, selon les propositions, vont de l’installation sonore aux live avec des disques Vinyle et à des formes proches de la performance auxquelles elle participe à côté d’autres auteurs et autrices, et où elle tient le rôle de « directrice artistique », selon ses propres mots. Une diffusion radiophonique en direct peut s’associer au projet scénique, mais celui-ci reste totalement autonome.

La proposition scénique d’Aurélie Charon[35] s’est développée à partir d’une sollicitation qui l’a conduite à prolonger sur un plateau une série radiophonique diffusée sur les ondes. L’autrice a ainsi conçu une forme qu’elle appelle « Radio live, la relève », qui prévoit un échange de paroles en temps réel entre l’autrice et des interviewés, avec une part d’improvisation de la part de ces derniers, dans le cadre d’un dispositif bien ficelé qui inclut des passages filmés, des appels téléphoniques sur vidéo en temps réel, et des moments musicaux joués en direct.

Enfin, David Christoffel introduit des moyens de production radiophonique dans des formes scéniques qu’il préfère appeler des opéras parlés, son propos étant « de lier le poétique et le musical, tout en trouvant les modalités radiophoniques d’une justesse toute spéciale pour ce faire »[36]. Il observe par ailleurs que « l’inscription de la représentation scénique dans le cadre d’un festival de radio peut lui faire penser la forme de la performance scénique comme une forme radiophonique » et « renforcer l’hétérogénéité de la nature et des modes de fabrication des sons diffusés au cours de la performance, mais aussi porter dans le même espace l’allée et venue entre différents niveaux énonciatifs »[37].

De fait, la lecture de la programmation des œuvres scéniques présentées dans le cadre du Festival Longueur d’ondes, révèle comment les diverses approches scéniques cherchent à garder l’empreinte de la radio : soit par la transposition de la forme documentaire (qui passe par la transcription de paroles du réel énoncées par des actrices[38], ou la présence sur scène de personnes « du réel » portant leur témoignage[39]), soit par une fiction radiophonique interprétée en direct, donnant à voir l’envers du décor à travers la fabrication des bruitages, l’action des mixeurs, le texte lu ou joué[40]. Tantôt un dispositif prévoit que les spectateurs portent des casques et restent dans la pénombre[41], tantôt un autre qu’ils aient les yeux bandés[42]. Il peut également s’agir d’un docu-fiction sur scène, qui fait se rencontrer des professionnels et des amateurs pour produire une réflexion sur le théâtre, la radio et la vie de quartier[43], ou de formes plus éclectiques encore, comme une lecture-concert ou une conférence-concert où se juxtaposent des sons, des musiques, des voix radiophoniques remixées[44].

 

Pour la radio : une radio performance
au croisement de la musique et de la radio

 

Pour conclure ce panorama, je voudrais partager avec les lecteurs une dernière proposition de radio sur scène à travers la présentation de ma radio performance, Pour la radio, créée à Brest dans le cadre du Festival Longueur d’ondes le 5 février 2018. De mon point de vue, la radio performance établit un point de rencontre entre la musique et la radio. J’ai toujours ressenti une grande affinité avec cette forme hybride, car à travers elle je peux réunir deux formes artistiques que j’ai pratiquées alternativement : le théâtre musical et l’art radiophonique. Si j’ai appelé cette radio performance Pour la radio, c’est parce qu’il s’agissait de rendre hommage au média à travers différents moyens sonores et scéniques.

L’élaboration de cette radio performance reposait sur certaines bases, dont la plus importante était l’utilisation de voix enregistrées d’artistes et de compositeurs, provenant de mes archives personnelles[45]. Ces voix archivées ont fourni de précieux matériaux pour rendre hommage au média car, abordant la radio et le son, elles étaient toujours pertinentes et souvent poétiques. L’autre prémisse était ma participation sur scène, car je voulais intervenir en tant qu’instrumentiste, et produire de la musique en direct. J’ai alors décidé d’associer à la radio performance un musicien électroacousticien qui pourrait partager la scène avec moi et prendre en charge la partie électroacoustique à travers la composition, la diffusion et la transformation des sons et des séquences en temps réel. C’est ainsi que le compositeur Diego Losa, membre du G.R.M. (Groupe de Recherches Musicales de l’INA), a participé à la composition et à la réalisation du projet. J’ai également choisi de faire intervenir sur scène un groupe de lectrices et de lecteurs qui produiraient de l’oralité en direct, à travers la lecture de textes, et qui pourraient en outre réaliser des actions scéniques.

Avec tous ces éléments, la radio performance devenait une œuvre mixte composée de matériaux enregistrés, et de paroles et musiques jouées en direct. Les matériaux enregistrés étaient :
– les énoncés des compositeurs (échantillonnés et distribués sur un clavier) ;
– des sons que j’ai appelés « clichés » parce qu’il sont à la fois emblématiques et typiques des Hörspiele;
– des sons qui leur sont historiquement associés, comme le brouillage ou le zapping ;
– des motifs électroacoustiques abstraits qui permettaient d’articuler les scènes ;
– enfin, des séquences composées sur le thème du voyage, ce sujet étant la métaphore des déplacements immobiles auxquels la radio nous convie.

Les éléments joués en direct étaient, d’une part, les improvisations instrumentales – au piano et au clavier échantillonneur –, en dialogue avec un support électroacoustique ; d’autre part, les improvisations vocales polyphoniques du quatuor de lecteurs et lectrices, à partir de textes écrits de différentes natures. Certains reprenaient des témoignages entendus sous forme de commentaires, d’autres textes étaient des proverbes sur le thème du voyage, et d’autres encore avaient comme sujet général la radio. La radio performance se composait de huit scènes ; la durée de l’ensemble était d’environ quarante minutes.

Après sa création à Brest, une première version multilingue de Pour la radio a été présentée à la Haus den Kulturen den Welt, à Berlin[46], ce qui a demandé certains ajustements du projet original francophone. Ainsi, pour pouvoir inclure des témoignages dans d’autres langues, j’en ai demandé à des artistes sonores de différents pays, qu’ils devaient enregistrer dans leur langue maternelle. En même temps, le rôle des lecteurs et lectrices était non seulement de lire des textes mais aussi de traduire sur scène certains témoignages en français, parmi les plus significatifs et les plus étendus (ceux de Pierre Schaeffer, de Luc Ferrari notamment).

 

Pour la radio : répétitions
Festival Longueur d’ondes, Brest, 3 février 2018
Andrea Cohen et Diego Losa
© Véronique Lamendour

 

Pour la radio d’Andrea Cohen et Diego Losa
Version multilingue présentée
à la Haus den Kulturen den Welt (Berlin) le 10 novembre 2018

et diffusée sur la WDR3 le 27 décembre 2018
Compte Soundcloud d’Andrea Cohen

 

Pour la radio est retourné à la radio de deux manières : en Allemagne, la station de radio WDR a diffusé en différé l’enregistrement de la radio performance[47], tandis qu’en France, la chaîne France Culture a diffusé la radio performance sous la forme d’un making of[48]. De cette façon, la radio performance devenait un documentaire sonore dans lequel étaient retracées les étapes de son élaboration, ce qui offrait une approche analytique de l’œuvre scénique, tout en la faisant retourner au médium auquel elle rendait hommage.

En guise de conclusion, je citerai RoseLee Golberg, lorsqu’elle affirme que la performance est « un antidote indispensable aux effets de distanciation et d’aliénation de la technologie »[49], et j’ajouterai, d’atomisation sociale. Ainsi, il me semble que la radio performance, et plus généralement, toutes ces formes de radio sur scène, questionnent et enrichissent la relation des auteurs et autrices, et des spectateurs et spectatrices, avec le média.

 

 

Notes

[1] Voir Mark Cory, « Soundplay, the Polyphonous. Tradition of German Radio Art », dans Dan Kahn et Gregory Whitehead (dir.), Wireless Imagination. Sound, radio and the Avant-garde, Cambridge, Massachusetts/Londres, The MIT Press, 1992, p. 334-336. Dans cet article, Cory reprend les catégories établies par Reinhard Döhl dans son livre historique sur les nouvelles formes radiophoniques. Il distingue trois types de radio qui coexistent jusqu’à l’avant-guerre : le Sendspiel ou « théâtre pour aveugles » qui consiste en une simple adaptation théâtrale ; le Wortkunstwerk (appelé plus tard Worthörspiel) fondé sur l’expressivité de la parole et ses potentialités poétiques et dramatiques ; le Musikhörspiel, forme annonciatrice de l’art radiophonique contemporain, qui combine musique, texte et son, en les considérant comme des matériaux d’importance égale. Dans la classification proposée par Döhl, le troisième type de radio reste le seul véritablement expérimental : un art radiophonique conçu comme un art acoustique en rupture avec les conventions littéraires.

[2] Selon la classification établie par Klaus Schöning, dans le cadre du festival ont été présentés sur scène des Hörspiele appartenant aux catégories suivantes : le Hörspiel-performance, le concert avec effets acoustiques, le film Hörspiel, la sculpture sonore, le ballet Hörspiel (Klaus Schöning, Acustica international. Komponisten als Hörspiel Macher. 27 September-1 Oktober 1985, Eine Dokumentation, Cologne, WDR, 1985, p. 207).

[3] Ibid., p. 210. Je traduis.

[4] « Tout d’un coup le Hörspiel, parti de l’idée aveugle de faire de l’art acoustique, retrouve l’image et retrouve la scène (le direct) ; on fait de la radiophonie en utilisant l’espace scénique, en utilisant l’action. Cela recouvre l’idée d’installation, d’action scénique, de théâtre musical, tout en restant, dans un sens, expérimental, c’est-à-dire, on fait un concert-radio sur scène ; on fait de la radio, mais on la met dans le cadre du théâtre. » (Luc Ferrari, entretien réalisé par Andrea Cohen, dans Andrea Cohen, Les Compositeurs et l’art radiophonique, thèse de doctorat, Paris Sorbonne, 1996, annexe, p. 48).

[5] La série s’intitulait Vue imprenable sur l’acoustique. Voir la présentation de Luc Ferrari sur le site de l’IRCAM.

[6] Sur le site de la Kunstradio, on trouve des informations sur les différents projets menés au sein de cette radio.

[7] « L’art radiophonique élargi » est le nom expérimental que la Kunstradio a donné aux projets artistiques qui vont bien au-delà du support de diffusion traditionnel et des stations de webradio formatées à leur image, et qui entreprennent des expéditions dans un espace radiophonique beaucoup plus vaste et transitoire, en train de se constituer.

[8] Citons le Festival Engrenages à Marseille (2003 et 2008), Longueur d’ondes à Brest (depuis 2003) ou Brouillages organisé par Radio Campus à Paris depuis 2014.

[9] Voir Muriel Plana, « Pour un théâtre musical contemporain », dans Muriel Plana, Nathalie Vincent-Arnaud, Frédéric Sounac et Ludovic Florin (dir.), Théâtre musical (XXe et XXIe siècles). Formes et représentations politiques, nouvelle édition [en ligne], Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 2019.

[10] Plus récemment, en Allemagne, parmi les artistes qui ont abordé la scène et le Hörspiel, on peut citer Paul Plamper (né en 1972) et le collectif Rimini Protokoll fondé en 2000.

[11] Mauricio Kagel, cité sur le site Ars-Acustica. Je traduis.

[12] Le Tribun (1979) ou Rrrrrrr Rrrrrrr…, une fantaisie radiophonique (1981-1982) ; Cäcilia, ausgeplündert. Ein Besuch bei der Heiligen (1985).

[13] C’est le cas de Die Befreiung des Prometeu, d’abord Hörspiel puis spectacle : voir le site de Heiner Goebbels.

[14] Gianfranco Vinay, « Vanités et dramaturgies négatives », dans Laurent Feneyrou (dir.), Musique et dramaturgie, esthétique de la représentation au XXe siècle, Paris, Publications de la Sorbonne, 2003, p. 815.

[15] Dans le cadre imparti, je me suis limitée à esquisser le sujet, car une étude comparative sur la relation de Kagel et Goebbels avec le théâtre musical et l’art radiophonique mériterait un article à elle seule.

[16] RoseLee Goldberg, La Performance du futurisme à nos jours, trad. Christian-Martin Diebold, Paris, Thames & Hudson, 2001, p. 9.

[17] Ibid.

[18] Dans « Qu’est-ce que la performance ? », dossier pédagogique appartenant à la série « Spectacles vivants et arts visuels », publié par le Centre Pompidou sur son site, le critique d’art Gérard Mayen passe en revue les diverses formes de performances au XXe siècle.

[19] Pour plus d’informations sur Anna Friz, voir le site de l’artiste ainsi que l’entretien paru dans la revue Syntone : « The Radio Lady. Entretien avec Anna Friz », entretien réalisé par Étienne Noiseau, Syntone [en ligne], 26 janvier 2012.

[20] Voir Tetsuo Kogawa, « A Radioart manifesto », publié sur le site de Tetsu Kogawa (non daté).

[21] Sur Tetsuo Kogawa, voir Étienne Noiseau, « Tetsuo Kogawa ou la radio à mains nues », Syntone [en ligne], 31 oct. 2012.

[22] Reinhard Döhl, « Theorie und Praxis des Hörspiels », article de 1994 accessible sur le site de la Stuttgarter Schule : « nicht den Menschen in Bewegung sondern mehr die Bewegung im Menschen zeigen ».

[23] Mauricio Kagel, entretien réalisé par Andrea Cohen, dans Andrea Cohen, Les Compositeurs et l’art radiophonique, op. cit., p. 68.

[24] Ibid.

[25] Ibid.

[26] Ibid.

[27] Le terme « podcast » ne désigne ni genre, ni format, ni contenu, mais un mode de diffusion en ligne sur page web ou sur application.

[28] Pour certains, il s’agit de répondre à des sollicitations extérieures alors que d’autres signalent la difficulté à trouver, pour leurs œuvres de création radiophonique, des espaces de diffusion hertzienne ou sur les plateformes. D’autres encore remarquent que la possibilité de créer des performances radiophoniques s’offre du fait du coût relativement bas qu’elles représentent, comparé au coût moyen d’une production théâtrale ; certains, enfin, mentionnent la possibilité d’avoir accès à des financements dédiés au spectacle vivant, aux musiques actuelles/contemporaines ou à l’art contemporain.

[29] Plus loin dans cet article, je décris les œuvres scéniques de plusieurs artistes sonores rencontrés, qui entrent dans la première catégorie (Judith Bordas, Aurélie Charon) ou dans la deuxième (Marie Guérin, Benoit Bories).

[30] Entretien téléphonique réalisé le 20 septembre 2022. Sur Judith Bordas, voir le site de l’artiste.

[31] Entretien téléphonique réalisé le 15 septembre 2022. Sur Marie Guérin, voir le site de l’artiste. La version radiophonique de sa performance Même morts nous chantons est disponible sur le site Hörspiel und Feature.

[32] Entretien téléphonique réalisé le 18 juillet 2022. Sur Benoit Bories, voir le site Faïdos sonore ainsi que ces exemples de créations sonores qu’il joue sous forme de concert en son immersif : Les Gardiennes du temple (coréalisé avec Aurélien Caillaux, 2022), Bouilleur de crû (2021) et La Foresta dei violini (2020).

[33] Entretien téléphonique réalisé le 3 septembre 2022. Sur Antoine Richard, voir  le site de l’artiste et la pièce qu’il donne en séance d’écoute mise en scène : Là où se rejoignent les rivières (2022).

[34] Entretien téléphonique réalisé le 18 septembre 2022. Sur Amandine Casadamont, voir la page Instagram de l’artiste et quelques extraits de ses œuvres issues de la scène : La Dernière Heure, kind of Hörspiel mix (France Culture, 2015) et Émeute (2022, sur le compte Soundcloud Amandine Casadamont radio).

[35] Entretien réalisé le 3 octobre 2022. Pour une description de ses radio live, voir le site Radio Live et les bandes-annonces de Radio live et de La Relève.

[36] David Christoffel, contacté par courriel le 31 août 2022. Sur les œuvres radiophoniques de David Christoffel, voir l’entretien dans thaêtre (« Hybridations sonores. David Christoffel au micro ») et le site de David Christoffel. Voir aussi l’oratorio Consensus partium avec Alessandro Bosetti (RTS, 2021), et deux performances de 2022 : Le feedback a toujours raison (mot de passe : feedback) et S’écouter parler (performé à l’Atelier Michael Woolworth en coda du colloque « Archives sonores de poésie » organisé par Double Change).

[37] Ibid.

[38] La Galette des reines de Géraldine Gacon, mise en ondes, musique originale et mix d’Arnaud Forest, production Arte Radio, Festival Longueur d’ondes, 2022 (voir le documentaire radiophonique dont est issu le spectacle et qu’Arte Radio a mis en ligne en 2018).

[39] Ouest Side Stories #3 : Des livres, et nous Oufipo, Festival Longueur d’ondes, 2022. Voir le site de l’Oufipo (Ouvroir de finestérités potentielles).

[40] Les Chemins du désir de Claire Richard, réalisation de Sabine Zovighian et Arnaud Forest, production Arte Radio, Festival Longueur d’ondes, 2019. Les six épisodes de la fiction radiophonique Les Chemins de désir sont accessibles sur Arte Radio. Une captation du spectacle adapté du podcast est accessible sur le compte Vimeo Les Indépendances.

[41] Piletta ReMix, Collectif Wow !, Festival Longueur d’ondes, 2019. Deux articles sont consacrés à cette production dans thaêtre : Juliette Meulle, « Faire voir le son. Bruitages sur scène dans trois créations contemporaines », et Sébastien Schmitz, « Créer l’espace radiophonique sur scène. Laboratoire de dispositifs sonores avec le Collectif Wow ! », thaêtre [en ligne], Chantier #8 : Dispositifs sonores. À l’écoute des scènes contemporaines (coord. Marion Chénetier-Alev, Noémie Fargier et Élodie Hervier), mis en ligne le 15 janvier 2024.

[42] Femmes brestoises en guerre, compagnie La Rigole, Festival Longueur d’ondes, 2019.

[43] Et si les terres ne finissaient pas, réalisation de Nora Boulanger Hirsch et Ludovic Drouet, Festival Longueur d’ondes, 2020.

[44] Faire des vagues, lecture-concert de Jocelyn Bonnerave, Arthur B. Gillette et Victor Blanchard, Festival Longueur d’ondes, 2018.  

[45] J’ai interviewé une vingtaine d’artistes dans le cadre de mes recherches doctorales sur les compositeurs et l’art radiophonique. Voir Andrea Cohen, Les Compositeurs et l’art radiophonique, op. cit.

[46] La présentation de la radio performance Pour la radio à la Haus der Kulturen der Welt (Berlin, Allemagne) a eu lieu le 10 novembre 2018 dans le cadre de l’exposition « Radiophonic Spaces ». Une présentation plus récente de la version multilingue de la performance s’est déroulée au SESC 24 de Maio (Sao Paolo, Brésil) le 21 octobre 2022. L’événement a été organisé par l’artiste et productrice Janete El Haouli avec le soutien du Consulat général de France au Brésil.  

[47] La radio performance jouée à Berlin a été diffusée dans son intégralité à la WDR3 le 27 décembre 2018 et est accessible sur mon compte Soundcloud.

[48] La diffusion radiophonique de la performance sur France Culture a eu lieu le 14 mars 2018. Voir une présentation détaillée de l’émission sur le site de France Culture : « Épisode 11/23 : Pour la radio, making-of d’une radio performance », série Tandem, Création on air, France Culture.

[49] RoseLee Goldberg, La Performance du futurisme à nos jours, op. cit., p. 225-226.

 

L’autrice

Andrea Cohen est artiste sonore, compositrice et pianiste d’origine argentine. Elle poursuit une démarche pluridisciplinaire dans laquelle musique, théâtre et radio entretiennent une constante relation. Elle a créé et interprété de nombreuses pièces de théâtre musical et produit régulièrement des essais radiophoniques et des documentaires pour France Culture (Radio France). Elle a soutenu sa thèse en musicologie du XXe siècle à l’Université Paris-Sorbonne en 2005, et l’a publiée sous le titre Les Compositeurs et l’art radiophonique, dans une coédition INA/L’Harmattan (2015). Elle a également fait paraître Manuel de pédagogie musicale : art sonore, musiques mixtes, théâtre musical, aux Éditions Minerve en 2020.

 

Pour citer ce document

Andrea Cohen, « Performer la radio. Du Hörspiel sur scène à la radio performance », thaêtre [en ligne], Chantier #8 : Dispositifs sonores. À l’écoute des scènes contemporaines (coord. Marion Chénetier-Alev, Noémie Fargier et Élodie Hervier), mis en ligne le 15 janvier 2024.

URL : https://www.thaetre.com/2024/01/15/performer-la-radio/

 

À télécharger

Performer la radio

 

Les commentaires sont clos.